Une soirée Skype entre amis dégénère en festival de révélations scabreuses et de suicides sous l’impulsion d’une hackeuse revenue d’outre-tombe pour se venger de ceux qui l’ont poussé à se donner la mort en postant vidéo et commentaires humiliants sur YouTube ou Facebook.
J’espère que vous avez lu le résumé qui précède d’une traite sans reprendre votre respiration au milieu. Ça commence à devenir coton comme exercice. Depuis que j’ai décidé que mon premier paragraphe serait, autant que faire se peut, une présentation de l’argument général de chaque film chroniqué, je me retrouve face au même défi : en dire assez sans en dire trop, si possible en restant clair et le moins chiant possible. Dure vie que celle du blogueur confidentiel que je suis. Envoyez vos dons.
À part ça, Unfriended ? Une excellente surprise, à vrai dire. Je m’attendais dans le fond à un truc un peu bateau, avec un topo assez scolaire sur les dangers des réseaux sociaux et le comportement malsain que nous sommes tout susceptibles d’adopter cachés derrière nos écrans, un peu comme dans le catastrophique Panic Button que j’ai eu la chance infinie de regarder en février, et dans lequel cette réflexion était d’ailleurs à peu près le seul élément intéressant.
Il y a évidemment de cela dans Unfriended, et même beaucoup de cela, mais contrairement au Panic Button caca cité plus haut, il y a aussi une vraie virtuosité dans la forme. Le film entier nous donne à voir l’écran d’ordinateur de la jeune Blaire : les sites qu’elle consulte, les discussions privées par messagerie qu’elle entretient, les conversations Skype, etc. La narration se fait entièrement à travers cet écran. Un exercice franchement casse-gueule et qui tient totalement la route, à deux ou trois exceptions de facilité près.
D’abord parce que le film propose un environnement réaliste. On se promène sur Facebook, sur Skype ou Google, avec une historique de navigation, de messagerie, d’onglets ou de marque-pages qui ressemblent vraiment à ce que l’on peut trouver sur l’ordinateur des vrais gens. Mine de rien, ça compte. — Ensuite, parce que le scénario sait réellement jouer de cette contrainte narrative et ne se contente pas d’habiller un parti-pris gadget. Au-delà du concept, il se passe vraiment quelque chose. Ce qui compte encore plus.
Ce n’est pas que le scénario soit d’une originalité folle, mais la manière dont il est mis en scène renouvelle vraiment le principe et sait le rendre plutôt trépidant. De plus, la forme même de la narration demande une attention soutenue du spectateur, qui doit à la fois suivre les dialogues, lire les messages, et surveiller de manière générale les indications survenant sur l’écran de la jeune femme – le tout en anglais, of course. Une narration à la première personne franchement hardcore, sans le caractère sexy du found-footage, quoi que laisse penser l’affiche du film qui pompe à mort sur Paranormal Activity.
Alors comprenez-moi, je ne dis pas que Unfriended est le film du siècle, mais il serait d’une abominable mauvaise foi de nier que son concept même, qui gagnerait à ne pas être décliné sur trois douzaines de films à venir, a quelque chose de novateur. Et qu’autour de ce concept a su s’articuler un film intéressant, captivant par moments, quand bien même son scénario n’échappe pas aux clichés du genre. Il y a une vraie démarche derrière ce film. Ça se respecte et se recommande.
Sur ce, je vous laisse.