Chris et Rose sont en couple depuis 5 mois. Il est Noir, elle est Blanche, et il s’apprête à rencontrer sa famille, dans un coin aussi perdu que bien-portant financièrement. Si Chris craignait d’être accueilli fraîchement de par sa couleur de peau, c’est au contraire avec une politesse exquise et une curiosité des plus condescendantes qu’il est reçu. Ainsi que par les sourires de zombies lobotomisés des quelques autres afro-américains résidant dans ce charmant voisinage.
Difficile de parler du film sans spoiler, mais il a fait suffisamment parler de lui pour que le canevas général de l’intrigue soit connu de beaucoup. Donc bon, sans rentrer dans les détails, disons que Get Out porte la métaphore des relations entre Blancs et Noirs aux États-Unis, sur un mode mi-humoristique, mi-horrifique. Encore que le côté comédie de la chose ait été largement exagéré. Ce n’est pas que le film ne soit pas drôle, c’est juste qu’on aurait tort de classifier son caractère satirique dans le registre de la bonne grosse blague.
Parce qu’un film d’horreur dans lequel les « méchants » sont les Blancs en général, au sein d’une petite communauté de notables pleins aux as, ça n’est pas une plaisanterie. Pas seulement. C’est aussi une réflexion sur une Amérique raciale, plus encore que raciste. Et sur ce besoin d’une classe dominante de se sentir tolérante, ouverte d’esprit, en acceptant la différence à condition qu’elle corresponde à l’idée qu’elle s’en fait. Et que chacun sache rester à sa place et avoir son utilité.
Après on ne va pas se mentir : je balance un peu tout ça en vrac en me disant que, dès demain, la moitié de ce que je viens d’écrire n’aura plus aucun sens à mes yeux, tandis que j’aurai déjà une idée plus précise de ce que sont, selon moi, les finalités de Get Out. Mais je sais que si je n’écris pas ma petite chronique maintenant j’aurai la flemme de le faire plus tard, et ce n’est pas parce que personne ou presque ne lit mes billets qu’il faut se laisser aller, non mais.
Et puis surtout, ça peut valoir le coup de regarder Get Out aussi pour ses qualités extra-métaphoriques. C’est-à-dire pour sa construction narrative, pour son scénario, pour son ambiance, pour le suspense qu’il arrive à distiller. Si le film est un peu prévisible par moments, il garde en réserve des moments de surprise savoureux. Ainsi que des respirations qui, encore une fois, ne suffisent pas à le classer dans le registre de la comédie.
Finalement, et le plus amusant dans l’histoire, c’est que Get Out m’a fait penser en partie à Traitement de choc, un film assez bizarre de 1973 avec Delon et Girardot, réalisé par le mondialement célèbre et inoubliable Alain Jessua (oui, c’est ironique). On est d’une certaine manière dans le même registre métaphorique, dans la même dimension satirique aussi, en plus âpre forcément dans les années 70. Donc bon, si vous avez trouvé l’un intéressant, il est possible que l’autre ne vous déplaise pas. Mais peut-être aussi que je raconte n’importe quoi, une nouvelle fois.
Sur ce, je vous laisse. Ah, et c’est un bon film au fait. Je ne sais pas si j’ai pris la peine de le mentionner vraiment.