Après avoir survécu au massacre par des zombies de son expédition scientifique, une jeune femme accepte de retourner sur les lieux pour accompagner une équipe paramilitaire chargée par une entreprise d’aller retrouver la trace d’une autre équipe ne donnant plus signe de vie. En somme, pour résumer, on envoie une équipe se faire massacrer pour porter secours à une autre équipe qui s’est faite massacrer après qu’une première équipe se soit également faite massacrer. À ce rythme, la courbe du chômage sera inversée dans les six mois.
Signé Vincent Dawn, l’un de ses nombreux pseudonymes, Zombi : la Creazione est l’avant-dernier film de Bruno Mattei. Oui, le Bruno Mattei de Virus Cannibale ou de Zombi 3, entre autres oeuvres improbables. Celui que l’on a surnommé le Ed Wood italien, titre qu’il se dispute avec Joe d’Amato mais qu’il mérite finalement bien plus. Bruno Mattei, le type qui compte une cinquantaine de réalisations à son actif, et autant de navets absurdes. Bruno Mattei, l’anti-virtuose du stock-shot, le je-m’en-branlisme incarné, l’homme qui chie de la pellicule. J’exagère ? À peine. Bruno Mattei est un si mauvais réalisateur qu’on ne peut que le trouver sympathique.
Là où je m’interroge, c’est que ce film est donc son avant-dernier, le tout dernier (selon IMDB) étant L’isola dei morti viventi. Or, cette Creazione semble précisément être la suite de L’isola dei morti viventi, du moins si j’en juge par le quart d’heure de flash-back disséminé tout le long de l’histoire. Sauf que bon, quand un coffret DVD cite un film en premier, quand je vois que le film en question a été réalisé avant l’autre, et qu’en plus son titre est La Création (et même Zombies : The Beginning en anglais), je m’attends naïvement à ce qu’il soit le premier de la série… Bref, L’isola dei morti viventi est le prochain sur ma liste, j’aurai donc le fin mot de l’histoire bientôt…
À part ça ? Hé bien La Création est une merveille. Je jure que c’est vrai. Je n’avais pas autant ri devant un film depuis des années. En général, j’ai déjà eu l’occasion de l’écrire, les nanars me font marrer cinq minutes puis finissent par me lasser, mais là non : jusqu’au bout j’ai trouvé matière à me poiler tout seul comme un con. Grâce à une direction d’acteur statique, qui fait ressembler chaque scène où les acteurs interagissent à une sorte de ballet contemporain, arythmique et saccadé. Grâce à des doublages français (pas de VO dans l’édition DVD) d’une extraordinaire indigence. Grâce aussi à des dialogues dans lesquels les personnages ne font que débiter des clichés ancestraux, enfoncer des portes ouvertes, se donner des conseils inutiles, proférer des plaisanteries insipides ou des onomatopées grotesques.
En fait, j’avais hésité à faire une sorte de petit inventaire de tout ce qui m’a le plus fait rire dans La Création. Les portes qui sautent au ralenti, le docteur qui assume avec un naturel désarmant d’utiliser les mêmes méthodes qu’Adolf Hitler, la soldate quinquagénaire qui se déclare la seule à savoir « déclencher une antenne », ou simplement cette étrange armée qui se revendique d’une autorité militaire tout en portant un uniforme aux couleurs d’une compagnie privée… La liste serait longue, mais franchement, allez, regardez ce film, ce sera beaucoup mieux.
Enfin, regardez le si vous ne craignez pas trop le crade non plus. Ça reste un film de zombie, même si c’est plutôt gentillet pour du Mattei, mais la bonne grosse barbaque bien saignante et les traditionnelles scènes d’éviscération sont encore au rendez-vous. C’est gratuit, c’est mal fait, ça fait plaisir !
Le pire, c’est que j’ai quelque chose à saluer, au milieu de ce machin foutraque. À la toute fin du film, qui n’a strictement ni queue ni tête par ailleurs, nous sont présentés des espèces d’enfants zombies qui se déplacent en exécutant une danse désarticulée et qui, au final, en jettent franchement pas mal. Si l’on fait abstraction des ralentis qui polluent la scène (et l’ensemble du film d’ailleurs, qui en use de manière presque aléatoire pour arriver à ses 90 minutes réglementaires), on est peut-être en présence de l’une des plus belles choses que j’aie jamais vu dans tous les films de Mattei que j’ai eu l’occasion de regarder. Mais à tous les coups, il l’a piqué à quelqu’un d’autre.
Ah oui, parce que j’ai oublié de vous le signaler, mais cette Création pompe totalement son scénario sur celui d’Aliens. Le film de James Cameron est pillé sans vergogne, dans son déroulement comme dans ses ressorts dramatiques, quitte à nuire totalement à la tenue ou la cohérence du scénario. En même temps, il a raison Bruno : Aliens est un bon film, y a pas de raison de pas faire la même chose en remplaçant les créatures de Giger par des zombies mal maquillés qui remuent les bras en maugréant.
Sérieusement, si vous aimez les films d’horreur, si vous aimez les trucs qui ne ressemblent à rien, si vous en avez marre de regarder des produits calibrés SyFy et avez envie de voir un vrai, un beau, un grand navet nanardesque, trouvez-vous un moyen de regarder La Création. Mais bon courage, c’est tellement obscur comme truc que je n’ai même pas trouvé une pochette ou affiche en langue originale pour illustrer l’article.
Et je n’arrive plus du tout à me souvenir où et quand j’ai acheté ce coffret comptant trois films du réalisateur, que j’ai retrouvé aujourd’hui en bas d’une pile de dvd en faisant du classement… Si nous étions dans un film d’horreur, le coffret serait hanté et l’esprit de Mattei prendrait possession de moi durant la nuit.
Sur ce, je vous laisse. Ciao Tutti !