L’histoire d’une jeune maman de – déjà – quatre enfants qui, souffrant nous dit-on d’un syndrome de dépression post-natal, profite d’être quelque peu délaissée par son routier de mari pour courser et trucider avec beaucoup de conviction sa progéniture.
Je vais commencer par un fait qui revient souvent mais m’amuse toujours, à savoir la multiplicité des titres sous lequel on retrouve ce film. S’il est édité en DVD pour la France sous le titre The Mother, c’est Mother tout court qui apparaît au générique. Du moins en traduction, puisque Mother est le titre « français » du film qui s’appelle en réalité Baby Blues, à moins que ce ne soit Cradle Will Fall, ainsi que certaines sources le mentionnent.
En même temps, tous ces braves gens qui choisissent des titres auraient gagné du temps en appelant le film Miss Shining, tellement on pense à Kubrick du (presque) début à la fin. Pas question de parler de plagiat, c’est juste que Sir Stanley a tué le métier. Montrez-moi un bonhomme ou une bonne femme pourchassant ses enfants à travers sa maison ou dans son jardin et je colle immédiatement la tronche de Nicholson dessus. C’est plus fort que moi.
Cela dit, j’adopte un ton railleur à propos de ce film parce que j’ai un mauvais fond mais, en réalité, Mother est loin d’être inintéressant. D’abord par son courage : développer une – relative – violence graphique autour de meurtres d’enfants n’est pas franchement à la mode aujourd’hui. Ici, on ne pourra pas s’empêcher de faire la grimace devant quelques passages qui, sans jouer la carte de la complaisance, ne se cachent pas derrière leur petit doigt. Ça me rendrait presque des enfants sympathiques. C’est vous dire le talent.
Ensuite par son ambiance. En cela, toute l’introduction du film est une réussite : le visage défait de la mère au bord de la crise de nerf, la sensation de malaise qui l’environne et les crises de folie qui s’emparent d’elle de manière impromptue posent une atmosphère follement oppressante et malsaine. Pour le coup, on pense à Polansky. Et on regrette que les réalisateurs n’aient pas pris le temps de mieux développer la chose, plutôt que de faire sombrer leur personnage dans la folie meurtrière comme sous l’effet d’un interrupteur magique.
La seconde partie du film relève en effet plus d’une espèce de slasher beaucoup trop linéaire, secondé par une bande-son terriblement cliché et des dialogues qui sonnent creux. Je ne dis pas que c’est raté, mais c’est surtout assez conventionnel. Je parlais de courage précédemment : c’est justement dommage que les personnes qui ont fait ce film n’ait pas fait montre de plus d’audace en ce qui concerne sa réalisation proprement dite, tant dans la forme que dans l’articulation narrative.
Toute la tension dramatique de Mother réside dans le fait qu’une mère atteinte de démence massacre ses propres enfants. Mais rapidement, la maman en question devient une espèce de machine à tuer qui répète en boucle des imprécations maternelles, à la manière d’un Terminator programmé par Laurence Pernoud. Une caractéristique que vient confirmer l’épilogue du film, où l’absurde touche à son paroxysme. Sur un sujet pareil, aussi dérangeant soit-il, n’aurait-il pas mieux valu assumer jusqu’au bout son propos ?
Bon, tout ceci ayant été dit, je maintiens tout de même que Mother est un film qui vaut largement le coup. Oui, il laisse un peu sur sa faim. Oui, il a du mal à sortir de certains sentiers battus. Et oui, il aurait mérité des acteurs un peu plus convaincants. Mais il est aussi prenant, sait remuer les entrailles tout en évitant le putassier, et ne laisse clairement pas indifférent. En somme, on lui pardonne volontiers ses défauts tant ses qualités sont appréciables.
Sur ce, je vous laisse. Ou on. On vous laisse. Je ne sais pas pourquoi j’emploie tellement le « on » dans ce billet, alors que le on en question n’est jamais que moi. Mais si je est un autre et que on est un con, suis-je moi-même un autre con ou juste le con d’un autre ? Enfin bref.