Des lycéennes en uniforme inscrites dans une école catholique qui se font assassiner de la manière la plus sordide qui soit, avec pour agrémenter le tout des scènes de douche avec nichons et poils pubiens de vigueur, et du bon gros sang rouge bien épais qui tache ? Aucun doute : nous sommes dans un film italien.
Mais soyons honnêtes : Cosa Avate Fatto A Solange ? tient avant tout du film policier et, comme cela arrive quelquefois, je n’étais pas certain qu’il méritasse (hé oui) de figurer dans un blog consacré au cinéma d’épouvante. Si encore son tueur avait été un bonhomme masqué, comme dans Six femmes pour l’assassin, on aurait encore pu parler de giallo pré-slasher et le ranger sans trop de soucis dans la petite case qui convient. Mais même pas : nous voilà en présence d’un assassin aussi sadique qu’invisible.
Et pour le coup, c’est le sadisme qui nous sauve ! La cruauté des meurtres et la violence graphique que se permet le réalisateur font de Mais qu’avez vous fait à Solange ? une oeuvre sensiblement sordide qui lui vaut sa place parmi nous ce soir. Le meurtrier a en effet la bien détestable habitude de planter ses couteaux entre les cuisses de ses victimes, et de les y laisser ostensiblement. Jamais symbole phallique n’aura été plus évident, mais le dénouement du film donnera un tout autre éclairage à ce fétichisme barbare.
J’avais envie de parler du film ne serait-ce que pour son titre. En italien comme en français – si l’on oublie le Jeux particuliers que mentionne IMDB –, on aura du mal à trouver titre plus inquiétant et plus parlant. L’un de mes préférés avec Apportez-moi la tête d’Alfredo Garcia. Avec une grosse différence : dans le film de Peckinpah, l’Alfredo Garcia en question est très rapidement mentionné. Tandis qu’ici, on n’entendra pas parler de la fameuse Solange avant au moins une heure de scénario. La figure, centrale, de Solange plane au-dessus de l’histoire comme un mystère d’autant plus malsain que l’on subodore le pire.
Il convient d’ailleurs de dire que Mais qu’avez-vous fait à Solange ? est un bon film. Si certains passages font sourire tant ils ont vieilli, si quelques courts intermèdes comiques étaient parfaitement dispensables et si l’on reste parfois dubitatifs devant le jeu de quelques acteurs, l’ensemble de l’oeuvre se suit avec plaisir et maintient en éveil sans aucunement se vautrer dans un suspens facile. En plus de son intrigue principale, le scénario propose également quelques aspects annexes (notamment l’étrange relation entre le professeur Enrico Rosseni et son épouse) qui s’y fondent à merveille et attise le cerveau du spectateur sans le perdre. La réalisation propose de vraies moments de bravoure et la musique d’Ennio Morricone (mais oui !) sert très bien son propos.
Pour ce qui est de la violence graphique mentionnée plus haut, je vous rassure : on reste dans du très soft comparé à ce que le cinéma italien allait nous servir dans quelques années. Mais il faut bien reconnaître que certaines scènes font grincer des dents, bien plus pour l’angle de représentation choisi que pour ce qu’elles montrent réellement. Encore une fois, c’est un million de fois moins gore que n’importe quel épisode de Walking Dead, mais l’on notera avec respect et gratitude que Massimo Dallamano sait traiter de l’abject sans sombrer dans un voyeurisme exubérant.
Et, à propos de voyeurisme, je ne résiste pas au plaisir de signaler que l’on trouve au générique du film, chargé de la photographie, le nom d’Aristide Massaccesi, soit le vrai nom de monsieur Joe D’Amato. Une présence qui préfigure quelques-unes des orientations du cinéma de cet artisan méritoire, tant en termes de nudité que de violence et de goût de l’extrême. Mais n’était-ce pas une constance dans le cinéma d’exploitation italien des années 70 ?
Sur ce, je vous laisse.