Michael est un creep, un freak, un geek, un weirdo. Bref, Michael aime les films et les jeux vidéos d’horreur. Délaissé par un père absent, il vit entouré de machines high-tech qui forcent l’admiration et se désespère de rencontrer LE jeu qui lui procurera de vraies émotions fortes. Et il ne sera pas déçu lorsque Brainscan fera irruption dans sa vie.
Brainscan n’est franchement pas passé à la postérité, et c’est une formidable injustice. J’ai adoré ce film lorsque je l’ai vu la première fois, diffusé sur Canal + dans le cadre de ses samedis soirs consacrés à l’épouvante – à l’exception du premier du mois bien sûr, je sais que vous y avez tous pensé bande de vicieux. J’ai re-adoré ce film lorsque je l’ai revu bien des années plus tard, après l’avoir trouvé en dvd dans une boutique d’occases. Et j’ai re-re-adoré ce film en le regardant hier soir, toujours en dvd malheureusement, la version blu-ray restaurée n’étant pas à l’ordre du jour.
Alors bien sûr, on peut se gausser des aspects extrêmement vieillots du film qui accuse bien ses vingt ans. Mais à bien y regarder, on a connu bien pire. La seule chose qui jure, mais alors qui jure vraiment, c’est la technologie hallucinante dont dispose le jeune Michael dans sa chambre d’ado pas spécialement fortuné. À commencer par son ordinateur qui répond aux commandes vocales avec une agilité démoniaque, composant des numéros de téléphone dictés à la vitesse de l’éclair et gérant à peu près tout le terminal de la maison. Moi je veux bien, mais là on est en 1994 les aminches.
Bref, on est en face d’une sorte de Wargames dix ans plus tard. Sauf que dans Wargames Broderick est un petit génie des ordinateurs, tandis que dans Brainscan Edward Furlong n’a pas l’air plus connaisseur que cela.
Le jeu Brainscan en soi est également hallucinant. Moi je veux bien qu’il utilise une technique d’hypnose en passant par les signaux blancs du poste de télévision, mais bon encore une fois on est en 1994. À cette époque, l’humanité subjuguée vantait les mérites du gameplay démentiellement révolutionnaire de Doom. Et moi, sur mon PC, je jouais à Monkey Island et à Dune 2. Et ça me bouffait la moitié de mon disque dur.
Mais franchement, est-ce que c’est important ? Bien sûr que non, c’est un film et si un film – fantastique, qui plus est – ne peut pas s’autoriser des libertés avec la réalité, autant se couper la nouille tout de suite pour s’en faire un pendentif. C’est juste toujours amusant d’observer comme le cinéma aime à sublimer la technologie, et donne l’impression de ne rien y connaître du tout.
Maintenant que j’ai fait ma crotte, parlons tout de même de ce qui fait de ce film une petite merveille. D’abord, le cité-plus-haut Edward Furlong, sans qui Brainscan ne serait pas ce qu’il est. Edward Furlong avait déjà crevé l’écran dans Terminator 2, il allait encore le crever dans American History X, et j’affirme qu’Edward Furlong aura été l’acteur adolescent le plus doué et le plus charismatique du cinéma américain du vingtième siècle. Ouais, rien que ça. Et j’assume à mort.
Une bonne gueule, un jeu subtil et déjanté à la fois, un vrai sens du mouvement, un charisme forcené. Si j’étais gay, j’en rendrais Edward Furlong responsable. Mais je ne le suis pas, et c’est la faute à Vanessa Demouy. Bref, je m’égare.
Très sérieusement, Furlong était l’acteur rêvé pour ce rôle, et lui insuffle tout ce qu’il faut de folie et d’ironie. Il est parfait en teenager désabusé qui se retrouve mouillé dans des affaires de meurtres sanguinaires, sans parvenir à se défaire des sentiments – aussi romantiques qu’en-dessous de la ceinture – qu’il éprouve pour sa jolie voisine. Terrifié, pris au piège, il campe un personnage poignant.
Brainscan se distingue également par un scénario plus recherché qu’il n’y paraît au premier abord, et jouant constamment avec la question de la violence au cinéma ou dans les jeux vidéos. Le film est rythmé, s’articule parfaitement et n’ennuie jamais. Si le personnage du Trickster (que l’on voit sur l’affiche) n’était pas totalement indispensable, il renforce au moins son côté résolument hard-rock qui fera le bonheur de toutes les oreilles esthètes.
Capable d’alterner sans jamais se contredire les scènes les plus drôles au suspens le plus haletant, jouant sur le code du burlesque (en cela, l’hommage aux trois Stooges est frappant) pour mieux sanguinoler quand le moment se présente, Brainscan est une réussite d’équilibre comme il s’en rencontre peu dans ce genre de productions moyennes des années 90. Le film qui surprend, en somme : on se le lance sans s’attendre à grand-chose, et on en ressort positivement ravi. Ils ne sont pas si nombreux, mine de rien.
Du coup, l’angoisse m’étreint : après vous l’avoir vendu comme un chef-d’oeuvre, n’allez-vous pas être forcément déçus en regardant Brainscan ? J’accepte de prendre ce risque. Je ne me censure pas quand il s’agit de vomir un film, je peux tout de même m’autoriser aussi à laisser parler, de temps en temps, ma nature profonde de fan enthousiaste !
Et sur ce, je vous laisse.